Publié par : pleaseplaythatnoiseagain | février 17, 2009

Cosmos Incorporated

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Cosmos Incorporated marque le retour, pour le grand public, de Dantec au roman, après la publication du TdO. Encore une fois, c’est un pavé percutant mélangeant les genres, les thèmes et la prospective de l’auteur.

2057. Grande Jonction.
Sergueï Dimitrievich Plotkine arrive en ville.
Avec une mission.

Immergés dans le récit, nous découvrons en même temps que Plotkine l’objet de sa mission. Parce que l’humain continue de disparaître un peu plus, nous devenons des machines que l’on peut réinitialiser. Cela, dans un monde qui a pris d’autres contours : une autre guerre mondiale a  eu lieu, l’Europe est en proie à de multiples conflits, et les USA, qui ne vont guère mieux, ont été le théatre d’une nouvelle guerre de sécession. L’UniMonde Humain, sorte d’ONU, la Meta Structure de Contrôle Cybernétique : voilà ce qui a remplacé les Etats Nations tels que nous les connaissons.  « Un monde pour tous. Un dieu pour chacun ». Les religions « intolérantes » sont illégales et le relativisme est roi. Mutation et sélection génétique. Améliorations corporelles grâce aux nano technologies…Dantec projette notre univers contemporain 50 ans en avant.

Dans ce monde, l’espoir pour beaucoup est d’enfin obtenir le billet donnant accès à l’Anneau, aux colonies spatiales, et tant pis si c’est au moyen de fusées archaiques et dangereuses du début du siècle. Grande Jonction, lieu de rencontre de tous les parias, où arrive Plotkine, est un territoire indépendant dont l’économie repose sur le Cosmodrome.

2057, centenaire du lancement de Spoutnik. Année symbolique.

Au fur et à mesure que la mémoire et la personnalité de Plotkine se reconstruisent, à l’aide de Metatron, processeur pirate implanté dans son cerveau, nous découvrons donc son objectif, tuer le maire de Grande Jonction, et au gré de ses parcours, la ville même de G.J. : topographie, influences, population et autres données utiles pour sa mission. Plotkine retrouve la mémoire, et avec, quelques bribes de musique, réminiscence des 80’s, qui l’interrogent sur qui il est réellement. Puis…La machine romanesque explose, parce qu’« Il fait partie d’un secret plus terrible encore que lui-même »…

La beauté sombre du texte fait miroir à l’environnement post apocalyptique dans lequel se meut Plotkine. Utilisant un langage technique et futuriste, le Langage de la Machine, ce roman dense, mystique et ambitieux, n’hésite pas à dynamiter  la narration et à se mettre en abyme pour mieux servir une ré-expansion de la réflexion, une réflexion théologique, politique, philosophique.
Dantec continuant de penser ses livres comme des armes, C.I. est une oeuvre à plusieurs niveaux, dans laquelle le récit même nous amène à nous poser certaines questions pour le moins essentielles, sinon vitales : « il s’agissait de montrer que la fin de la technique est la fin de la nature et de la culture ». En filigrane, c’est le récit d’une dévolution qui se met en place. Les avancées de la science sont du passé. Mais c’est aussi une réflexion sur la puissance du Verbe, sur la Création, sur l’Homme et la Religion qui apparaît à travers le récit crypté d’une conversion (ce qui permettra aux étiqueteurs en série d’inventer le terme de « thriller cyber chrétien » (1), à coller par dessus roman noir ou techno-SF).

Ce livre est une autre Bombe. D’un nouveau type.


Réponses

  1. Vive Dantec !

    Celui qui dit devant ! …plus que celui qui dit avant !

    Prophéte et poète…
    Un briseur d’anarchisme en rond, un empecher d’idolatrer en rond, un casseur de totalitarisme…

    Le nihilisme est totalitaire…

    Nihilisme et totalitarisme
    DOMENACH. Jean-Marie, Emmanuel Mounier, Ed du Seuil, Paris, 1972, page 174. « Au nihilisme, qui est totalitaire, ou qui appelle le totalitarisme. »

    DUMONT. Louis, Essais sur l’individualisme, Ed. du Seuil, Paris, 1983, page 161.
    « Nationalisme et marxisme sont tous deux construits sur un fondement individualiste, « nominaliste », et tous deux prétendent accéder à une collectivité – la nation, ou la classe sociale – douée d’une réalité qui en fait inconcevable pour de simples agrégats d’individus : elles auraient un destin, la promesse d’un développement, et même une volonté, soit des caractéristiques qui ne peuvent procéder que d’un mode de pensée holiste, « universaliste ». »

    CALVEZ. Jean-Yves, Socialisation et tendances totalitaires, in « Socialisation et personne humaine », Ed. de la Chronique Sociale, Paris, 1961, page 144. « Le progrès technologique implique une tendance à l’augmentation des dimensions de toute organisation. Dans cette perspective, les sociétés totalitaires apparaissent comme l’exagération, mais, tout compte fait, l’exagération logique de l’état technologique de la société moderne. Le danger serait inhérent à la société technique moderne ; le totalitarisme serait le fruit conditions sociales « endémiques ». La dictature totalitaire, écrivent C.J. Friedrich et Z.K. Brzezinsky, cette forme nouvelle est originale de l’autocratie, plus redoutable pour la dignité humaine que les autocrates du passé, apparaît alors comme un régime politique doué d’un puissant dynamisme ; il est encore en plein processus d’expansion. »


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